Avec le projet d’ENI lancé à toute vitesse, le Congo devient producteur de GNL
Le groupe italien ENI a mis en service son nouveau terminal flottant gazier. Un projet qui est déjà en phase d’extension et doit produire à terme 3 millions de tonnes de GNL.
Extraites, comprimées, liquéfiées, expédiées… Les toutes premières molécules de gaz naturel du projet offshore Marine XII, au Congo-Brazzaville ont pris le large. Fin février a été, en effet, réalisée la première expédition de GNL du pays d’Afrique centrale à destination du terminal de regazéification de Piombino, sur la côte toscane en Italie.
Le projet est issu d’un accord signé le 21 avril 2022, alors au plus fort de la crise européenne du gaz, entre le PDG d’Eni Claudio Descalzi et le président de la République du Congo Denis Sassou-N’Guesso pour la mise en valeur des réserves de Marine XII.
Il doit produire à terme 3 millions de tonnes de GNL, soit 4,5 milliards de m3 de gaz naturel (à titre comparatif, la France consomme environ 40 milliards de m3 de gaz naturel par an).
Le Congo détient les cinquièmes réserves de gaz naturel d’Afrique subsaharienne (288 milliards de m3, selon l’OPEP), sans que le pays ne soit parvenu à les exploiter à grande échelle. Le gaz naturel était jusque-là soit torché, soit réinjecté dans les gisements de pétrole et pour une part, toutefois, valorisé sous forme d’électricité.
A ce titre, le développement de Congo LNG va aussi permettre de sécuriser l’approvisionnement de la centrale à gaz CEC (Centrale Electrique du Congo), une petite partie du gaz traité par le projet y étant acheminé. Située à Pointe Noire, la CEC a vu début 2020 sa capacité portée à 484 MW contre 314 MW jusque-là.
Le consortium exploitant Marine XII est constitué d’Eni (65 %), du russe Lukoil (25 %) et de la SNPC, la compagnie pétrolière nationale du Congo (10 %), dirigée depuis 2018 par Maixent Raoul Ominga. Ce consortium a conclu le 14 septembre 2023 un contrat de vente de la production de Marine XII avec Eni SPA pour 20 ans.
D’un coût total estimé, à terme, à 5 milliards de dollars, le projet s’appuie sur des gisements d’hydrocarbures offshore en exploitation (Nené et Litchendjili) qui sont fortement étendus par des nouvelles plateformes en mer.
A ceci, s’ajoutent deux filières de traitement, l’une totalement autonome au large, encore en phase de développement, l’autre localisée près du rivage et de Pointe Noire où sont situées à terre les installations de prétraitement du gaz naturel. Celui-ci est ensuite réacheminé en mer vers une usine flottante de liquéfaction de gaz naturel (FLNG). C’est celle-ci qui vient d’entrer en exploitation.
Nommé Tango LNG, le navire spécialisé affiche une capacité d’environ 1 milliard de mètres cubes par an (soit 0,6 million de tonnes/an de GNL). Construit en 2017, il a été acquis en 2022 par ENI et reconfiguré par le groupe belge d’ingénierie pétrolière Exmar sur le chantier Drydocks World à Dubaï.
Le FLNG est amarré à trois kilomètres au large, aux côtés du navire de stockage Excalibur FSU également modernisé par Exmar qui le possède et l’exploite.
ENI et ses partenaires ont, pour rappel, lancé en décembre 2022 la commande d’une seconde unité flottante d’une capacité beaucoup plus importante de 2,4 millions de tonnes pour la phase dite offshore.
Ce navire de 380 mètres de long est en cours de construction par le groupe Wison (Nantong) Heavy Industry Co. sur ses chantiers de Nantong au bord de l’estuaire du Yangtze, face à Shanghai.
Avec ce projet, le Congo rejoint le cercle très fermé des exportateurs de GNL en Afrique qui compte moins de dix membres, dont l’Egypte, l’Algérie, le Nigeria, la Guinée équatoriale, le Cameroun, l’Angola et le Mozambique.
Un club qui sera bientôt rejoint par le Sénégal et la Mauritanie lors de la mise en exploitation du projet géant offshore « Grand Tortue Ahmeyim » conduit par BP et Kosmos Energy. Plusieurs fois retardé, ce projet doit entrer en exploitation au troisième trimestre 2024.
ENI est, pour rappel, le principal opérateur pétrolier au Congo et assure environ la moitié de la production du pays. Celle-ci s’élevait à 261 000 barils par jour fin 2022, un niveau inférieur au quota de l’OPEP et a fortement décliné ces dernières années, alors que l’État tire plus des trois-quarts de ses ressources fiscales du secteur pétrolier. Hormis les partenaires de Marine XII, les exploitants pétroliers du pays sont notamment Perenco, TotaEnergies, ainsi que le nigérian Pelfaco.